Interview de Kenta SAITO

Interview de Kenta SAITO,

1er prix du Concours International Adolphe Sax de Dinant 2019

 

 

Jérôme LARAN : Pourriez-vous nous présenter votre parcours ?

Kenta SAITO : Je possède un parcours de saxophoniste assez traditionnel au Japon. J’ai découvert le saxophone à l’âge de 12 ans puis j’ai intégré un orchestre d’harmonie au sein de mon collège.

Par la suite, j’ai étudié avec Masato IKEGAMI à l’Université Senzoku Gakuen College of Music, puis avec Nobuya SUGAWA à la Tokyo University of the Arts.

J’ai commencé à me présenter à des concours dès ma deuxième année de lycée ; j’ai souvent atteint l’épreuve finale, mais je n’ai finalement pu remporter le Premier Prix que lors du Concours International Adolphe Sax de Dinant de 2019.

 

Jérôme LARAN : Comment vous êtes-vous préparé pour le Concours International Adolphe Sax de Dinant 2019 ?

Kenta SAITO : J’ai commencé à me préparer en amont, mais je n’étais pas vraiment concentré, car j’avais un récital assez proche avec un programme totalement différent. Je suis venu ensuite en Europe pendant le mois de juillet 2019 et ce n’a été qu’au mois d’août que j’ai véritablement travaillé sérieusement.

Les œuvres imposées étaient particulièrement redoutables et il m’a fallu les aborder avec le plus grand soin et redoubler d’inventivité dans mon travail… mais j’en garde un excellent souvenir !

 

Jérôme LARAN : Que signifie cette victoire pour vous ?

Kenta SAITO : Il s’agit de ma première victoire et, de surcroît, dans un concours prestigieux dont j’avais toujours rêvé depuis que j’ai commencé à étudier sérieusement le saxophone. Cela m’a donné une plus grande confiance pour continuer à jouer et à développer mes activités.

Cette victoire me fait également sentir une grande responsabilité : être l’un des rares gagnants de ce grand concours signifie que je suis en mesure d’aider à accompagner le développement du saxophone. Mais cela m’ouvre également de nombreuses interrogations sur la place du saxophone « classique » dans notre époque qui voit un désintérêt grandissant pour la musique classique.

Jérôme LARAN : Quel a été l’impact de cette victoire dans votre vie ?

Kenta SAITO : J’ai l’impression que les regards envers moi ont changé et que je suscite plus d’intérêt. Cependant, le fait d’avoir remporté ce prix n’est pas une fin en soi : je dois continuer à travailler rigoureusement pour maintenir un bon niveau et un jeu de qualité.

 

Jérôme LARAN :  Êtes-vous plutôt calme ou plutôt stressé lorsque vous préparez un concours ?

Kenta SAITO : Préparer un concours n’est pas différent de préparer un concert. Il est indispensable de lire avec précision la partition et, sur cette base, y intégrer sa propre interprétation. Qu’il s’agisse d’un concert ou d’un concours, le but est toujours d’offrir de la belle musique au public dans la salle. Les gens apprécieront toujours le « beau jeu » et c’est à cela que je pense lors de mon travail.

Je suis, bien entendu, « stressé » pendant les concours, mais aussi pendant les concerts. J’ai participé, il y a quelques années, à un atelier de Technique Alexander qui m’a beaucoup aidé à mieux comprendre ce qui se passe physiquement dans ces moments de tension. Cet état de stress n’est pas spécifique à la musique, mais peut également se déclencher lors de n’importe quel événement auquel nous accordons de l’importance (présentation en entreprise, tournoi sportif, etc.).

Apprendre à identifier ces symptômes pour pouvoir les faire jouer en notre faveur – de façon consciente – est une des clés pour nous permettre de donner le meilleur de nous-mêmes.

 

Jérôme LARAN : À quoi pensez-vous lors de la préparation d’un concert ?

Kenta SAITO : Je pense à faire de la musique le plus naturellement possible. Parmi les performances que j’ai entendues jusqu’à présent, celles que je trouve les plus belles et qui m’ont le plus inspiré sont celles qui étaient les plus « naturelles ». Je désire transmettre cette simplicité dans mon jeu.

 

Jérôme LARAN : Quelles sont vos œuvres musicales de prédilection ?

Kenta SAITO : Il m’est difficile de choisir, car j’aime tellement d’œuvres… le Concertino da camera de Jacques IBERT, avec son harmonie « exquise » propre à la musique française garde, cependant, une place de choix dans mon cœur.

J’aime, également, beaucoup le deuxième Concerto pour piano de Serge RACHMANINOV. J’ai toujours été fasciné par la grandeur et la beauté des mélodies des œuvres de compositeurs russes.

 

Jérôme LARAN : Quels sont vos projets ?

Kenta SAITO : Je donne de nombreux récitals avec piano en plus de mes activités de professeur à l’Université de Senzoku. La période n’a pas été facile durant la récente pandémie. Je n’ai pas, encore, eu beaucoup d’activités en dehors du Japon, mais je serai très heureux de participer au prochain congrès mondial du saxophone à Las Palmas de Gran Canaria, puis à des activités à Paris en décembre prochain.

 

Jérôme LARAN : Que pensez-vous des nouvelles générations de saxophonistes ?

Kenta SAITO : La technique instrumentale évolue avec chaque nouvelle génération. Il y a beaucoup de jeunes saxophonistes qui ont un contrôle très solide des nouveaux modes de jeu, ainsi que des langages de la musique contemporaine et qui sont capables de jouer les pièces les plus difficiles avec une grande aisance.

 

Jérôme LARAN : Voudriez-vous adresser un message à nos lecteurs ?

Kenta SAITO : L’Ensemble des finalistes du dernier Concours International Adolphe Sax de Dinant, à mon exception, étaient des élèves ou bien des personnes diplômées du Conservatoire National Supérieur de Musique et de Danse de Paris. J’ai, tout de même, pu remporter le Premier Prix sans jamais avoir fait d’études en dehors du Japon.

Les saxophonistes français doivent être fiers que des étudiants du monde entier soient attirés par la merveilleuse éducation musicale de leur pays. À un moment donné, j’avais même envisagé de venir étudier ici, car il n’y a aucun doute que la France est le pays le plus développé au niveau de l’histoire du saxophone.  J’aimerais que vous continuiez à développer votre magnifique école qui nous inspire tous depuis de nombreuses années.

 

Interview réalisée par Jérôme LARAN

Chaîne Youtube de Kenta Saito